Numéro 8 Fertilisations croisées dans les arts, médias et langues

Numéro 8 : Fertilisations croisées dans les arts, médias et langues
Année 2018

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Comité de rédaction :
Rédactrices en chef :  A’icha Kathrada et Gianna Schmitter
Secrétaires de rédaction :  Alice Burrows et Marion Coste
Responsables du comité scientifique :  Laetitia Sauwala et Anne Sweet
Chargée de communication : Alexia de Mari
Chargée de finance :  Priscilla Coutinho
Chargés de mission : Sophie Desplanches et Antonino Sorci

Comité d’honneur : Pierre Civil / Phillipe Daros / Raphaëlle Moine / Aliyah Morgenstern / Dan Savatovsky
Comité scientifique (professeurs et enseignants-chercheurs) : Florence Baillet / Cécile Camart / Mariana Di Cio / Emmanuelle Garnier / Charlotte Gould / Kerstin Hausbei / Raphaëlle Moine / Danièle Moore / Fabrice Rochelandet / Arnaud Rykner / Christelle Vasserot / Bernard Vouilloux
Comité scientifique (docteurs) : Luisa Assunçao Pesché / Anne Cousson / Yann Deschamps / Léonor Grasser / Bhawana Jain / Fabien Landron / Camille Prunet / Maral Samil-Joseph / Maria Serafina Russo / Francesca Tumia
Comité de lecture : Valeria Arguello Castro / Morgane Belhadi / Emilie Darzi / Claire Dutoya / Raja Gmir Ezzine / Clément Grouzard / Tommasso Meldolesi / Constantin Mytaloulis / Lorreine Petters / Charles Plet / Etienne Sauthier / Charlotte Wadoux
Conception graphique et mise en pages : Inès Prévot
Illustration de couverture : Ranelagh, copyright Baptiste Rabichon

Numéro évalué par le comité de lecture des Presses Sorbonne-Nouvelle

La thématique du huitième numéro de la revue Traits-d’Union a donné lieu pour la toute première fois à une journée d’étude en 2017 avant la sortie de ce numéro en 2018, dont l’appel à contributions a suscité une trentaine de propositions. Les rédactrices en chef, A’icha Kathrada et Gianna Schmitter ont souhaité soumettre les communications présentées lors de cette journée à une évaluation par le comité scientifique au côté d’articles d’autres jeunes chercheurs. Par ailleurs, le dossier Invités a été considérablement étoffé par la participation de deux spécialistes de la discipline des fertilisations dans les arts et des artistes, dont Baptiste Rabichon, qui nous fait l’honneur d’illustrer l’intégralité du numéro par ses oeuvres. Le numéro a également été retravaillé par une nouvelle maquettiste, Inès Prévot. Les comités de rédaction, scientifique et de lecture sont désormais accompagnés d’un comité d’honneur, composé des directeurs des écoles doctorales de l’Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3, afin de garantir la caution éthique et intellectuelle de la revue, tout en illustrant sa diversité par les disciplines et thématiques traitées. Enfin, ce huitième numéro a été évalué dans son intégralité par les Presses Sorbonne Nouvelle, offrant une caution supplémentaire à la revue.

Sommaire :

Éditorial  
A’icha Kathrada et Gianna Schmitter

Composer l’hétérogène. Désordre de Philippe de Jonckheere
Corentin Lahouste 

Désordre, site internet créé, développé et alimenté par Philippe De Jonckheere depuis le tout début des années 2000, est une œuvre hypermédiatique à la structure étoilée qui se caractérise par l’hybridation sémiotique et la transartialité dans un cadre oscillant entre l’autobiographique et l’autofictionnel. Par ma contribution, il s’agit de montrer comment Désordre déjoue les formes traditionnelles ainsi qu’un principe d’uniformisation, en étant tout entier tourné vers une logique du déformatage, de l’hybridation et de la reconfiguration perpétuelle. Est mis en lumière la manière dont l’œuvre de De Jonckheere, composant l’hétérogène, se présente, à l’image de l’existence humaine, comme un patchwork de mille et un éléments sémiotiques rassemblés et mêlés entre eux. C’est également la portée critique et politique de Désordre, saisie comme œuvre trickster, qui sera soulignée dans ces pages.

Orfeo de Richard Powers : vers une poétique @
Anne-Catherine Bascoul

Dans le dernier roman de l’auteur américain Richard Powers, Orfeo, un compositeur retraité nommé Peter Els est accusé de bioterrorisme. Pris de panique, il s’enfuit et sur la route il envoie des tweets. La présence d’une autre forme d’écrit, le tweet, nous pousse à nous interroger sur sa fonction et nous montrerons que son utilisation est à l’origine d’une nouvelle forme intermédiale. Nous analyserons tout d’abord les tweets eux-mêmes qui sont une mise en page de l’écriture, brouillage des codes et lieu de déterritorialisation. Ces paragraphes sont ensuite intégrés dans la macrostructure du récit, convoquant alors une autre forme d’intermédialité : le musical. La musicalisation de la fiction se fait jour. Cependant, cette composition est d’un type nouveau puisqu’elle n’est pas fondée sur une double, mais sur une triple série de signes, autonomes au départ, qui se lient pour participer à la construction fugale du roman. Richard Powers transgresse les limites, ce pourquoi notre dernière partie se concentrera sur la création d’une nouvelle poétique de la prose dans un espace hybride, mais qui est aussi un lieu de reterritorialisation. Instabilité énonciative et brouillage situationnel sont présents à tous les niveaux de la narration ; ces transformations nous entraînent vers un nouveau genre romanesque, combinant nouvelle technologie, roman musicalisé et narration réaliste.

Fertilisations croisées du conte, entre transmédia et recyclage culturel  
Victoria Lagrange

L’ouvrage pionnier d’Angela Carter, La Compagnie des loups (1979), en déplaçant le programme intentionnel de l’hypotexte des contes a permis la dispersion transmédiatique du merveilleux. Cet article se propose d’analyser la prolifération du merveilleux à travers différents médias (comics, série télévisée, média vidéoludique). Il s’intéressera à la façon dont ces nouvelles adaptations permettent la création d’un nouveau genre hybride entre merveilleux et fantastique réaliste.

L’intermédialité aléatoire ou les rapports secrets entre cinéma et littérature  
Jessy Neau

Cet article interroge la pertinence de la notion d’« intermédialité aléatoire », expression forgée à partir de celle d’« intertextualité » aléatoire de Michael Riffaterre, et développée grâce aux travaux sur la série figurale (Martin Lefebvre), le remake secret ou déguisé (Marie Martin, Anat Zanger) ou encore la réécriture (Marie-Claire Ropars). L’article s’attache à analyser certaines expériences d’intermédialité faites par le lecteur-spectateur, dont la mémoire crée, à partir de textes et de films dépourvus de rapport objectif de reprise, des réseaux et des séries personnels.

Baptiste Rabichon, croisements photographiques entre mélancolie et jeu 
Présentation de Baptiste Rabichon

« We are your linguistic nightmare » Enjeux politiques du langage bâtard et du métissage dans les autohistorias-teorias de Gloria Anzaldùa 
Camille Back

Les autohistorias-teorías de la féministe queer chicana Gloria Anzaldúa, et Borderlands/La Frontera en particulier, sont écrites dans une langue consciemment métissée, entrelacement d’anglais nord-américain et d’espagnol chicano. À travers le code-switching – défi esthétique et politique – il s’agit tout d’abord pour Anzaldúa de témoigner d’une réalité linguistique et d’explorer le rôle de la langue comme marqueur d’une identité culturelle, à la fois facteur d’identification et symbole d’appartenance. Bien loin de faire référence à une langue originaire, elle cherche au contraire à rendre toute sa légitimité à ce langage bâtard, el lenguaje de la frontera, où, à la jonction des cultures, les langues sont revitalisées. Mais le métissage caractéristique de Borderlands/La Frontera, qui touche aussi bien à la langue qu’aux genres littéraires, constitue également un outil nécessaire à l’élaboration de ses théories : la subversion des attentes qu’engendrent ces différents métissages lui permet en effet de contester un mode d’existence dominant, un cadre de référence blanc, et d’instaurer de nouvelles façons de percevoir le monde. Autour du code-switching s’articule alors une poétique et une politique de la traversée et du passage, indissociables de l’émergence de la nouvelle conscience mestiza qu’Anzaldúa évoque dans Borderlands/ La Frontera et des concepts qu’elle définit.

Transmédialité, intermédialité dans le récit de vie raprès 1980. Diffractions et espaces potentiels de narration(s). A partir de Wir Kinder com Banhof Zoo de Kai Hermann et Horst Rieck
Cécile Rousselet

Les récits de vie s’inscrivent dans une démarche complexe, construite sur une tension entre mise en scène d’une indétermination et d’une dissémination des traces de l’expérience subjective, et conjugaison de ces signes dans une cohérence propre à toute reconfiguration narrative. C’est au creux de cette affirmation que l’on interrogera la dimension opérante du recours aux théorisations sur le phénomène multimédial, et plus spécifiquement sur l’intermédialité et la transmédialité, dans l’analyse des récits de vie. Y a-t-il une poétique intermédiale et transmédiale propre au récit de vie ? Dans quelle mesure ces théorisations permettent-elles de mettre à jour des caractéristiques inhérentes à ce genre narratif ? Comment les circulations discursives qui se détachent alors s’organisent-elles, et en quoi les approches du multimédial invitent-elles à considérer autrement la dialectique qui s’élabore dans les textes, entre ambition d’une totalité narrative et désignation de l’utopie que celle-ci représente ?

Le rôle de la musique et de la peinture dans Noce d’Elias Canetti 
Isabela Gusmao Duarte

Écrite durant l’entre-deux-guerres, à une époque où son auteur croyait que la fin du monde était imminente, Noce (Hochzeit, 1932), première pièce du théâtre de violence et de cruauté d’Elias Canetti, puise dans différentes sources afin d’atteindre son but ultime : secouer le spectateur. Cet article traite du rôle particulier de la peinture et de la musique dans ce drame apocalyptique, inspiré, entre autres, des tableaux de Pieter Bruegel l’Ancien, et de « l’apprentissage de l’oreille » que Canetti a reçu de son « ancêtre » Karl Kraus. À travers une analyse comparative du traitement de ces deux médiums dans le texte de Noce et dans l’une de ses créations scéniques, nous tâcherons de vérifier dans quelle mesure l’intermédialité fréquemment observée dans les mises en scène de (ou inspirées par) l’oeuvre canettienne, qui relève apparemment d’une ouverture stimulée par son caractère hétérogène, lacunaire et « injouable », correspond également à la volonté de l’auteur.

E. M. Foster, Roger Fry et la distraction fertile dans la musique, la peinture et la littérature
Julie Chevaux

Cet article aborde l’intermédialité sous l’angle de la comparaison entre les arts proposée dans le discours critique et la fiction d’E. M. Forster et Roger Fry. Ces derniers mettent en scène la distraction possible du spectateur ou de l’auditeur, qui peut voir des images dans de la musique ou trouver un texte pour mieux « lire » un tableau ; pour eux, ce détour met à mal l’universalité de l’oeuvre d’art en interposant des discours entre le sujet et l’oeuvre. Cependant, Forster et Fry sont pris entre un idéal formaliste, où chaque art ferait sens en lui-même et par lui-même, de façon presque immédiate, et la conscience que l’art moderne déstabilise le spectateur ou l’auditeur et impose un nouveau rapport à l’oeuvre d’art qui doit être revu et appris : écrire la distraction et les faiblesses du public leur permet de mettre des mots sur cet écart.

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